Une pierre tombale « anonyme » se trouve sur les hauteurs de l’île de Sainte-Hélène. Il y en aurait d’autres, paraît-il, d’après un responsable du domaine. Celle-ci est bien curieuse, une grille de fer l’entoure. Mais de quoi ont peur les autorités de l’île ? Que le défunt s’échappe ? Qu’un « déséquilibré » vienne faire des fouilles ? Elles devraient, pourtant, être rassurées, il est parti depuis longtemps, en octobre 1840. Il serait même parti avant, osent dire certains, une pensée « délirante », comme de la « poudre de perlimpinpin » répondrait d’un air amusé le directeur de la Fondation Napoléon.
UN CHAR FUNÈBRE
« Et Hudson Lowe, ex coach pour corsican rangers, serait revenu sur le lieu du crime. Pardon, sur le lieu du décès naturel du général Bonaparte – seul titre autorisé par la gouvernance de l’époque – puis, dans la foulée, il aurait récupéré le char funèbre sur ordre de George IV ou de Wellington, deux collectionneurs d’objets ayant appartenu à l’illustre Empereur ».
Ne nous emballons pas devant cette imagination, ce char funèbre est bien revenu à Londres après 1821, mais on ignore quand précisément, et par qui. Le 15 octobre 1840, jour où les restes mortels de « l’incognito » quittent cette île maudite, on ne semble pas faire mention de ce char. Et c’est en 1858, qu’il réapparaît : la reine d’Angleterre Victoria, en visite à Paris, l’offrit à Napoléon III. Entreposé quelques décennies aux Invalides, il repose actuellement au château de Malmaison, rarement à la vue du public.
Au début du XIXe siècle, le trajet entre Ceylan et Londres se faisait par bateau, en passant par l’océan Indien et l’océan Atlantique. Les bateaux pouvaient faire escale à l’île Maurice, au cap de Bonne-Espérance, à l’île de Sainte-Hélène, aux îles du Cap-Vert, ou aux îles Canaries. Après 1821, Hudson Lowe avait emprunté, à plusieurs reprises, l‘axe Londres – Ceylan – Londres. En 1827, pour rejoindre son commandement aux Indes, puis en 1828 et 1831. Les informations sur les dates d’escale et sur son emploi du temps à Sainte-Hélène sont introuvables, pour le moment.
LES PÉRIPÉTIES DE LOWE
En 1827, Walter Scott critiqua Hudson Lowe dans un livre intitulé « Observations sur la vie de Napoléon Bonaparte ».
En 1828, ayant appris cela, Lowe quitta Ceylan pour l’Angleterre afin de se défendre publiquement. Il monta à bord du HMS Alexander, commandé par le capitaine Richardson, et fut accompagné du lieutenant de Lancey (son aide de camp et beau frère), l’honorable Carrington et le major Morris.
Le 28 avril 1828, ils arrivèrent à l’île Maurice, puis dînèrent chez le gouverneur Sir Lowry Cole. D’après Huet de Froberville, l’ensemble des Mauriciens considérait Lowe comme le bourreau de Napoléon, autant dire que sa venue ne fut pas appréciée. Hué par un groupe de Français, Lowe eut le temps de porter plainte. Quelques jours après, les autorités interpelèrent Auguste Albert (employé du gouvernement), Henry Adam, Bargain, Félix Barbé, Emilien Desjardins, Desperles, Paul Fabre, Larcher, Lenoir, les deux frères Plassan (officiers de marine), et les deux frères Sorney. Le 27 mai, aucune condamnation ne fut prononcée. Le gouverneur regretta les outrages des Français. Il semble qu’il n’eut aucun complot, ni préméditation.
L’éphéméride du mois de novembre 1828 informe que le HMS Alexander s’échoua sur les côtes d’Angleterre et que « Hudson Lowe se sauva en chemise…« . À Londres, le gouvernement des Tories fut déstabilisé et on conseilla à Lowe de repartir à Ceylan pour éviter des problèmes supplémentaires.
Après la mort de George IV en juin 1830, et après la démission du premier ministre Arthur Wellesley alias Wellington en novembre 1830, Lowe ne fut pas désigné pour être gouverneur de Ceylan et dut retourner en Angleterre pour l’année 1831.
En septembre 1831, il quitta Colombo à bord du Doncaster, commandé par le capitaine Surflen. Le 9 septembre, il débarqua à l’île Maurice. Le 16 septembre, n’étant pas très apprécié au bal de Lady Colville, il s’éloigna des invités. Le 20 septembre, il repartit pour l’Angleterre…
Sources : éphémérides de l’île Maurice du XIXe siècle.