En 2011, l’université d’Anvers et l’université de technologie de Delft avaient découvert un portrait caché sous celui de Don Ramón Satué peint par Goya. L’analyse au balayage macro X-spectrométrie de fluorescence montre un portrait non terminé d’un homme assis, portant une tenue d’officier de couleur sombre avec plastron jaune qui pourrait correspondre à la tenue des grenadiers de l’infanterie de ligne.
Sur la poitrine, on reconnait le Grand cordon rouge ou Grand-croix de l’Ordre royal d’Espagne, une plaque de Grand aigle de la Légion d’honneur, une plaque avec étoile rouge et rayons d’argent correspondant à la plaque de Grand-commandeur de l’Ordre royal d’Espagne, ainsi qu’un début d’étoile rouge avec pointe vers le bas correspondant à la croix de l’Ordre royal des Deux-Siciles. Au col, un début de cordon rouge de l’ordre de la toison d’or.
EST-CE JOSÉ 1er ?
Le visage est certes méconnaissable, mais raisonnons par élimination : le seul susceptible de porter cette tenue militaire et ces décorations étatiques est José 1er, roi d’Espagne et frère de Napoléon.
De plus, un portrait peint par François Gérard, daté de 1810, représente José 1er avec une tenue ressemblante, et quelques décorations citées plus haut. Ce portrait est exposé à Aspley house (Wellington Museum) à Londres. Une copie de ce portrait, peinte par François Joseph Kinson et datée de 1811, est exposée au Bowes museum, à Barnard Castle, nord de l’Angleterre. Une autre copie, peinte par Inès Esménard et datée de 1837, est exposée au musée de la maison Bonaparte à Ajaccio. D’après les indices relevés, on pourrait dater le portrait d’origine entre 1808 et 1813.
POURQUOI FAIRE UN AUTRE PORTRAIT ?
En 1813, José 1er perdit le pouvoir en Espagne et revint en France. On suppose qu’à ce moment-là, Goya garda ce portrait non terminé. Ferdinand VII, de retour sur le trône d’Espagne en 1814, remit le pays dans une monarchie absolutiste.
En 1823, une répression plus forte contre les libéraux fut employée dans toute l’Espagne, et Goya, afrancesado* et ayant souscrit à la Constitution libérale, dut se cacher pendant trois mois dans la maison de Don José Duaso y Latre, l’oncle de Don Ramón Satué. C’est dans ce contexte qu’il aurait pu réaliser ce nouveau portrait afin d’éviter tout problème.
TRACÉ DU PORTRAIT
Ce portrait a appartenu au marquis de Heredia et à Benito Garriga au XIXe siècle. En 1890, il a été vendu aux enchères pour 1500 francs. En 1902, le Docteur Joachim Carvalho l’achète pour 9510 francs, à l’Hôtel Drouot à Paris, et l’expose au château de Villandry en France. En 1922, le Rijksmuseum l’a racheté.
Dimensions : 107 × 83,5 cm / Description Rijksmuseum : D. Ramon Satué / Alcalde de la cour / Par Goya en 1823. Don Ramón fut un juge. Sa lettre de nomination sur la gazette de Madrid, numéro 173, date du 20 juin 1821.
Le magazine The Burlington du mois d’octobre 2011 contient un article sur ce portrait caché…
Afrancesado* : francophile, ayant juré fidélité à la politique bonapartiste de José 1er.
Sources: BOE – Gazette de Madrid / Delf University of Technology / Goya en Aragon Fondation / Rijksmuseum