Réactions sur le burnous de Napoléon

Avis de Nadine Touzeau

En tant que profiler, métier appartenant aux sciences du comportement, des suites des publications du Carré Impérial (investigations de décembre 2011 au 18 juin 2015) et de Thierry Lentz, directeur « général » de la fondation Napoléon (chronique de septembre 2018).

Quelle surprise que de découvrir ce manteau qui aurait un « N » brodé à l’intérieur. Pourquoi une telle surprise, c’est d’abord parce que je ne le trouve pas dans l’esprit Premier Empire français, ensuite des détails mettent en avant des éléments qui ne correspondent pas au profil de Napoléon :

1) Le style du manteau ! Napoléon avec une capuche et même une cape d’apparat qu’il aurait gardé sur un champ de bataille, Waterloo en l’occurrence. C’est juste improbable. Napoléon n’était pas du genre à s’encombrer de quoique ce soit sur un champ de bataille. C’était un homme terrain pas un homme de salon ! Et cela se savait. Quand bien même, il appréciait les belles choses, il savait effectuer ses missions dans ce qui devait être fait, sans écart, ni esbrouffe, ni parade.

2) Justement, en tant qu’homme de goût, je ne le vois pas apprécier ce manteau tel qu’il est conçu. La capuche est le signe le plus important d’autant qu’elle est austère et peut très bien cacher le visage de celui qui la porte. Ce qui ne correspond pas du tout au profil de l’Empereur, viril, qui affrontait tout temps, toute situation sans jamais masquer son visage. Napoléon n’aurait pas revêtu ce genre de manteau peu confortable, lourd, trop riche et grossier en ornement. Un manteau qui fait penser à un vêtement de rituel. Lui qui inventait les tenues afin qu’elles soient élégantes, chichement ornées avec finesse et pratique selon la circonstance, comment aurait-il pu s’encombrer d’un tel manteau !

3) S’il avait des objets à ses côtés, il n’en demeure pas moins que Napoléon ne se surchargeait en rien une fois en déplacement et encore moins sur un champs de bataille. L’essentiel était requis avec une touche de sentimentale très probablement telles des lettres de la femme du moment dans son cœur et des portraits de son enfant.

4) Un burnous offert par ses amis lors de la campagne d’Egypte aurait pu se faire. A-t-il été répertorié ? Car Napoléon faisait tout noter ! Y compris ce qu’il embarquait de ci et de là. Ou est inscrit ce burnous ?

5) Le « N » à l’intérieur peut convenir à d’autres personnages tel l’amiral Nelson qui, lui, aurait pu parfaitement convenir à des univers obligeant à porter certains types de vêtement.

6) Depuis quelques années, certaines personnes n’ont de cesse de mettre sur le dos de Napoléon 1er des faussetés dans ses actes, faits, gestes, idées… pourquoi pas aussi les vêtements !

Mon hypothèse conclusion est que je doute que ce manteau ait appartenu à Napoléon 1er. Si tel était le cas, je ne crois pas qu’il l’ait porté et encore moins amener sur un champ de bataille.

Ma question est : quel est l’intérêt de ce burnous concernant Napoléon et au regard des influences relatives à la fusion franc-maçonnerie et Illuminati qui a eu lieu avant l’avènement de Napoléon ? Une réflexion qui fait écho au fait que j’ai découvert des comportements mettant en avant Napoléon luttant contre cette fusion et les comportements de plusieurs personnes mettant en avant une volonté de nuire et faire échouer l’Empereur. Parfois avec regret tel le comportement du tsar Alexandre 1er. A suivre.

Profilement Vôtre

Nadine TOUZEAU
Profiler, net-profiler, researcher in behavior of cybercriminals / mail : ntprofiler@nadinetouzeau.com / nadinetouzeau.com


Avis de John Tarttelin

J’ai découvert une description de ce burnous sur la publication du Centre de recherche du Textile.

Le burnous est originaire d’Afrique du Nord, mais pas l’Egypte. Napoléon aimait ses Mameluks et était fasciné par l’histoire de l’Egypte. L’article dit que la soie jaune semble être française. Je me demande s’il s’agit d’un cadeau reçu, lorsqu’il était en Égypte en signe d’amitié ou d’alliance, ou une sorte de souvenir reçu lorsqu’il était Empereur, confectionné à Lyon, le célèbre centre de soie de France.

Comme Nadine, j’ai du mal à croire que le burnous était dans sa célèbre voiture à Waterloo. La référence à la franc-maçonnerie est intéressante. Tout le centre de Washington D.C. a été fait selon les principes maçonniques et la plupart des célèbres Américains à l’époque étaient maçons.

Dans son récit de la campagne de 1812, Bourgogne dit que les officiers français en détresse qui donnaient des signaux maçonniques à leurs ennemis russes étaient souvent sauvés par leurs frères maçons russes.

Il est difficile d’en dire plus sur ce sujet. Comme je l’ai dit plus haut, je n’avais jamais entendu parler de cela, même avec mes 50 ans d’études pour l’histoire napoléonienne.

Il ressemble plutôt à quelque chose de « Game of Thrones » ! Et comme Nadine, je ne vois pas Napoléon le porter. La seule autre idée que j’ai est que c’est peut-être l’un des costumes plus élaborés de David dans le cadre du couronnement de Napoléon comme Empereur.


Avis de Loïck Bouvier

A propos de Thierry Lentz

Il m’est difficile, d’abord, de ne pas réagir quand je lis « chronique de Thierry Lentz, l’affaire rebondissante du burnous de Napoléon ». Mais en quoi cette cape spécialement conçue pour les cavaliers nomades serait-elle « rebondissante » pour le directeur « général » de la fondation Napoléon ? Il le précise : « Pour la énième fois, car cette affaire-là rebondit – comme tant d’autres – périodiquement ». Remarquez immédiatement, je précise « pour cavaliers nomades », c’est à dire une cape conçue idéalement pour les longues traversées à cheval et dont la matière, le feutre, protège intégralement de la pluie et du froid, cette précision importante n’est pas indiquée dans les descriptifs de la Royale Collection Trust, ni chez les habitués des salons parisiens, et les voyageurs qui ont l’habitude de traverser ce Monde en long, en large, pourront en saisir la nuance.

En ajoutant « comme tant d’autres », je suppose que Thierry Lentz pensait à l’affaire « de l’empoisonnement de Napoléon », une affaire dont il est allergique, puisqu’en 20 ans de règne sur le trône de la « Napoléonie », il a fait vœu de « débattre tout seul » sur ce sujet, en ignorant le professeur Pascal Kintz, toxicologue de renommée mondiale, qui a prouvé scientifiquement une ingestion chronique d’un poison, l’arsenic minéral, non pas « SUR » mais « À l’intérieur » (medulla) des cheveux de Napoléon, des cheveux prélevés sur différentes années de la déportation à Sainte-Hélène. Et il ignore, également, l’écrivain Jean-Claude Damamme, spécialiste de cette thèse dans la continuité de Ben Weider. Il semble même avoir assez de pouvoir dans les arcanes pour bloquer médiatiquement tous ceux qui oseraient lui envoyer des arguments différents de sa doctrine : « Napoléon est mort d’ennui » (sic).

Pas « d’affaire rebondissante » ! Comme le confirme notre correspondance de 2011 avec le conservateur du Département des Arts décoratifs du palais de Buckingham, la bibliographie sur ce burnous était vierge, ce qui nous avait tous surpris à l’époque. La première investigation est donc la nôtre, publiée quelques années après, et exclusivement pour le soir du bicentenaire de Waterloo, le 18 juin 2015. Evidemment, Thierry Lentz a pu la lire jalousement, et pour éviter des insomnies, il nous ignora comme à son habitude, espérant qu’aucune presse influente ne la relaie. Cela a tenu trois ans ! En effet, en 2018, le magazine « people » français, Paris Match, en publie un article, pompant en partie nos investigations sans nous citer, et choisissant bien-sûr une date, symbole de la fakenews, et qui assurait le « buzz » : le 1er avril ! Pour Thierry Lentz, c’était le retour d’un vieux cauchemard, le « fameux serpent de mer », cette fois-ci, bondissant. Il a dû être harcelé par ses fans de facebook qui, en message privé, lui posaient ce genre de question : « Cher maître, qu’est-ce donc que ce délire sur Paris Match ? Napoléon portait-il vraiment un manteau « islamiste » ? Ne nous dites pas que Napoléon était musulman, rassurez-nous, maître, répondez à cette fakenews, rétablissez la vérité, svp, Napoléon ne mérite pas d’être sali encore une fois par ces Anglais ». Et ce fut le « branle-bas de combat » au quartier-général du 7, rue Saint-Hilaire, à Paris, à quelques pas de l’ambassade du Royaume-Uni, dont Arthur Wellesley de Wellington en fit l’acquisition dès 1814. Le « petit bataillon de chercheurs », terme employé par le « directeur amiral en chef », était sur le pont, au taquet ! Mais quelle galère pour eux ! Thierry Lentz finit par débarquer sa chronique, 6 mois plus tard, en septembre 2018. Finalement, n’ayant pas trouvé de piste autre que la nôtre et de celle de la Royal Collection Trust, il s’est résolu à ne pas nous citer, à remettre en question ou à qualifier de « non sérieuses » nos investigations, et à nier les lettres manuscrites des Prussiens Blücher et Von Nostitz. En résumé, en panne d’arguments, Diktator tape du pied, se couronne, et décrète que la seule et unique analyse autorisée, c’est la sienne ! Simple, limpide, sans débat sur le chenal ! Pour le « maître », imaginez, ce serait comme une humiliation de devoir rajouter la biographie du burnous sacré (qu’il n’avait jamais entendu parlé) dans le livre « La Berline de Napoléon. Le mystère du butin de Waterloo » (Albin Michel), 2012, dirigé par le pape de la Napoléonie, Jean Tulard, et dans lequel, il y consacre le chapitre IV « La prise des voitures de Napoléon par les Prussiens au soir de Waterloo ».

Représentation et Réalité

Je remarque un focus sur le port du vétement et sur la franc-maçonnerie. Je pense que la clé de compréhension, qui ouvre les pistes inexplorées ou oubliées, n’est pas de savoir dans un premier temps si Napoléon a porté ou non ce vétement, mais d’en savoir la fonctionnalité comme je le précise sur mon premier paragraphe. Il faut reprendre certains principes antiques, comme « vaincre ses représentations » d’après Epictète, détecter les contradictions d’après Socrate, et appliquer une pensée de Chesterton : « on ne regarde jamais un pays, un objet avec des yeux neufs, les yeux neufs ne voient pas l’invisible ».

Exemple, le portrait équestre « Le franchissement des Alpes », par Jacques-Louis David, représente Napoléon sur un cheval blanc cabré. C’est une allégorie, et non la réalité, car en montagne, c’est l’utilisation de la mule qui est privilégiée. Autre exemple, les représentations de l’expédition d’Egypte montrent les soldats français en tenue de climat continental européen, et même d’hiver. Or, ils étaient dans un climat méditerranéen, et même désertique, et les tenues hors combat étaient légères et adaptées comme celles des autochtones. En mai 1814, arrivé sur l’île d’Elbe, Napoléon fut surpris de voir ses soldats porter les tenues d’hiver en laine. De suite, il décréta le port de la tenue d’été, en particulier, en lin blanc. Dans l’Armée française actuelle, il y a les tenues d’hiver et d’été, et le camouflage est adapté en fonction de la zone géographique. Moi-même, du temps où j’effectuais des observations au sein du commando de Penfentenyo, je portais une chèche ou grand foulard, indispensable dans les conditions désertiques, car cela protégeait le visage et les cheveux de la poussière permanente, sinon nous étions sales. Porter un voile n’est absolument pas lié à une religion mais c’est une protection adaptée au climat aride. Parfois, pour confirmer des informations, Napoléon se déplaçait lui-même à pied dans les rues de Paris, et en tenue civile ordinaire pour se fondre dans la masse. Quittant l’île d’Elbe en 1815 pour les tours de Notre-Dame, sa traversée en mer Méditerranée, puis ses premiers jours de marche sur le sol des Alpes maritimes sont considérés comme une mission commando. Être « incognito » était la condition pour accomplir la remontada. Napoléon pouvait se cacher, se déguiser, même croiser des riverains sans que ceux-là sachent qui il était. Il s’est dit, à ce moment, « redevenir un aventurier »… C’est une aptitude non conventionnelle, rare et à souligner.

Avancées et Replis

L’importance des mouvements comme dans un échiquier. Nous l’avons dit, nous avons eu une collaboration avec le Département des Arts décoratifs du palais de Buckingham, et nous avons contribué au descriptif officiel du burnous de la Royal Collection Trust. Et en 10 ans, il y a eu une évolution et des modifications du descriptif. Je peux déjà vous confirmer qu’il y a des omissions si nous faisons une observation entre le passé et le présent, et probablement que, à mettre au conditionnel, les autorités conduiraient le public vers une fausse piste ou un épais brouillard.

Exemples : Les descriptions dans les correspondances de Blücher et de son aide de camp, Nostitz, ne sont pas mentionnées. Le monogramme « N » n’est plus mentionné, et Thierry Lentz indique, dans sa chronique, un « N au fil d’or »… nous aimerions savoir de sa part où a-t-il trouvé ce détail ? George IV est mentionné de manière très limitée alors qu’il a le rôle principal dans cette affaire puisqu’il ordonne, lui-même, l’acquisition de ce burnous dans les plus brefs délais. Comment se fait-il que le Prince régent d’Angleterre ait employé tous les moyens en son pouvoir pour acquérir cette cape que Blücher, à la base, était censé garder ? Quelle est donc sa valeur à ses yeux ? Le terme « butin » est employé à chaque fois. Alors oui, cela correspond à un ensemble d’objets acquis, mais il faut savoir, même si de nos jours cela est censé être révolu, qu’en temps de guerre, certains objets peuvent avoir une appelation ou un symbole de « trophée », comme « trophée de guerre », « trophée de chasse » chez les souverains agissant tribalement et conformément à la définition antique. Comment se fait-il que le terme « trophée » est caché ou proscrit ? Le trône de Tippoo Sahib, sultan du Mysore (partie des Indes) n’est pas mentionné alors que Nostitz insistait sur le lien inséparable avec ce burnous, ce qui démontre que la cape avait une valeur inestimable, et surtout aux yeux de George IV et des Tories. Il y a pourtant un point commun, le nom de Wellesley de Mornington figure en haut de la liste des traqueurs d’Orient et d’Occident.

J’espère, à travers ces observations et ces questionnements, avoir ouvert quelques nouvelles pistes qui semblent passionnantes pour la suite…


Photo à la une : dessin/aquarelle de Guillaume Gibb présenté à la Reine Mary en 1935 (Source : The Royal Collection Trust).

Photo 2 : La salle de la collection royale, Windsor (Source : The Royal Collection Trust).